AUDEMARS PIGUET [RE]MASTER02 Asymétrie pour le deuxième Opus

Dans un océan où le rond gouverne en maître, il est toujours plaisant d’avoir de temps à autre un pas de côté, un retour vers le futur en l’occurrence ici quand Audemars Piguet nous présente sa [Re]Master02 après un premier succès en 2020 avec la [Re]Master01. Une “remastérisation” dans les règles de l’art inspirée d’une rare référence du début des années 1960.

Qu’est-ce que le programme “[Re]Master” chez Audemars Piguet ? Bonne question. On ouvre un livre d’archives, puis un deuxième, puis un trentième. On cherche des montres peu éditées, parfois classiques, comme c’était le cas en 2020 avec le chronographe (et encore, le terme “classique” pour ce chronographe bi-ton est discutable), parfois carrément d’une autre planète. On la scrute, on s’inspire de son époque, de son contexte, et on en propose une nouvelle version, non pas copie conforme de l’originale, mais une adaptation aux goûts plus contemporains. Aujourd’hui pour le deuxième volet de ce programme (j’aimerais dire programme spatial étant donné les lignes de la montre), c’est un modèle hors du commun qui a été choisi.

Ne me demandez pas pourquoi, mais au début des années 1960, Audemars Piguet produit une nouvelle montre, j’ai nommé la référence 5159, de forme totalement asymétrique. “Produire” n’est probablement pas le terme adéquat, puisque hormis quelques prototypes, seulement 7 exemplaires verront le jour. Le comble de cette histoire, c’est que la commande provient d’un importateur et distributeur de montres suisses en Angleterre du nom d’Elco Clock and Watches Limited. L’audace et le goût anglais parfois ! Le visage de la montre est unique, dans un boitier asymétrique de 27,5 mm en or 18 carats où la partie droite du boitier semble étirée vers l’extérieur, où s’exprime un très beau cadran argenté au motif soleillé constitué de 12 traits noirs horaires. Une montre qui a évoqué chez moi lors de la première rencontre l’idée d’un petit trésor de la civilisation Maya.

Voilà le support choisi pour présenter la [Re]Master02. Pas le choix le plus évident, mais un beau défi, à mon sens réussi pour Audemars Piguet. La première chose qui surprend lorsqu’on voit la [Re]Master02 n’est autre que son boitier hors du temps. Il reprend la forme de la pièce du début des années 1960, à savoir un jeu de facettes et de finitions, ici brossées et bien présentes visuellement, qui s’étend du côté droit, laissant ainsi de l’espace au sein du cadran, et une présence magnifique au poignet. Ce boitier de 41 mm intègre une des dernières trouvailles de la marque, à savoir le “Sand Gold“, nouvel alliage que nous découvrions un peu plus tôt en 2024 sur une Royal Oak Tourbillon Volant Squelette, constitué d’or 18 carats, de cuivre et de palladium, offrant des couleurs oscillant entre l’or gris et l’or rose en fonction de la lumière. Un effet assez dingue, où parfois on a l’impression de voir le boitier en noir et blanc, et quelques rayons de soleil lui donnent tout son éclat de chaleur.

L’autre claque provient du cadran. Et pour cette remastérisation, tout s’est concentré sur ce dernier, poussant un peu plus loin la technique. On retrouve la célèbre teinte “N50” pour « Bleu Nuit, Nuage 50 », obtenue par une toute petite quantité de noir ajoutée à la laque avant de recouvrir le cadran déjà bleu. Cette fois, le cadran est réellement découpé par des lignes dans la teinte du sand gold en douze triangles aux décors différents, découpage facilitant aussi largement la lecture de l’heure. Le fait d’avoir des décorations différentes et plus ou moins prononcées permet un jeu de textures et de couleurs assez fou, en adéquation avec le boitier. Naviguant au dessus de cette mer de nuages, deux aiguilles simples en or sand gold. Forcément.

Cerise sur le gâteau, ou plutôt chapeau de saphir sur boitier sand gold, le travail apporté au verre n’a pas été laissé de côté. Il reprend la pente, suit les courbes du boitier, et n’a pas été une mince affaire à réaliser, tout spécialement en saphir comme vous pouvez vous en douter. Il est d’ailleurs aussi agréable à regarder désolidarisé du boitier, avec tout ses biseaux permettant la fixation adéquate au boitier.

On trouve au dos, à travers un découpage apportant la seule forme ronde de la montre, le calibre 7129 mécanique à remontage manuel à la masse ajouré 22 carats dans les tons du boitier, et aux finitions sympathiques, comme du perlage et quelques angles polis. Un calibre prenant source sur le Calibre 7121 que l’on découvrait en 2022 sur les modèles Royal Oak « Jumbo ».

Pour accompagner la belle, un bracelet en alligator bleu, assorti au ton du cadran, et décoré d’un élégant effet mat contrasté qui vient renforcer les jeux de lumière.

La Audemars Piguet [Re]Master02 est une édition limitée à 250 pièces, proposée au prix de 47.100€ dans les boutiques de la marque. Pour l’instant en revanche, pas de jour exact sur l’arrivée de ces belles en boutique. Des montres qui nous plaisent énormément, pour sortir nos âmes du quotidien, un design original plaisant et tout de même assez dingue à observer au début des années 1960, dont le retour aujourd’hui est un bel hommage rendu à ces années là où tout était (presque) possible.